DEUX AGRICULTEURS DANS LA GUERRE

Un témoin : Elie JOUVEN

 

Photographie prise lors de l'interview d'Elie Jouven au collège.

Né en 1922, Elie Jouven, jeune ouvrier agricole, se marie le 11 novembre 1942 à Lambesc, jour de l'occupation de la Provence par les Allemands. Pour fuir le STO, il est contraint de quitter Lambesc sous peine d'arrestation. Il trouvera refuge à Draguignan et à Jouques auprès de la résistance.

Il reviendra fréquemment sur Lambesc. Elie Jouven n'avait pas avant la guerre d'engagement politique cependant l'occupation allemande était quelque chose pour lui d'inacceptable car, comme pour beaucoup d'autres, son patriotisme avait été exalté lors des réunions familiales qui faisaient la part belle aux récits des combats de la Première guerre mondiale. Son attitude pendant la guerre s'explique donc d'une part par la haine de l'occupant allemand et d'autre part par un réflexe de survie. et .

 

Rare témoin encore vivant, Elie Jouven, nous a décrit quelques aspects de la vie quotidienne dans le monde rural pendant l'occupation. Les maquisards étaient surnommés  « terroristes » ou « réfractaires » par les occupants allemands et les habitants. Pendant l'occupation, les habitants avaient des cartes de rationnement avec lesquelles ils pouvaient se procurer, en quantités limitées, des denrées devenues rares du fait de la guerre.

 

 Exemple de carte de rationnement

Le jour de son mariage, Elie et sa femme ont pu se rendre en voiture jusqu'à la mairie de Lambesc grâce à de l'essence que leur avait offert un cousin. L'essence était un produit peu courant pendant la guerre, de nombreux véhicules avaient d'ailleurs été obligé de s'adapter à la pénurie et fonctionnaient désormais au gazogène. Si ce cousin disposait d'essence c'est parce qu'il était transporteur routier et que son entreprise avait été réquisitionnée par l'occupant.
Elie Jouven nous a également appris que plusieurs familles de Marseille étaient venues s'installer à Lambesc pendant la guerre. En effet, la vie quotidienne était plus facile dans les campagnes que dans les villes. En ville, la peur des rafles et des bombardements était dans tous les esprits. Le ravitaillement était très difficile. A la campagne, la présence de l'occupant était moins visible et on se nourrissait mieux. On pouvait améliorer l'ordinaire des tickets de rationnement grâce aux produits de la basse-cour, du potager et du verger. La famille d'Elie Jouven, comme d'autres agriculteurs, a aidé les « Marseillais » en leur donnant des oeufs, un poulet quand cela était possible.

Un résistant du maquis de la chaîne des Côtes:

Henri BLANC

 

 

Né en 1920, Henri Blanc est cultivateur à la ferme du Grand verger à Lambesc lorsqu'il entre dans la résistance contre l'occupant allemand (fin 1942, début 1943). C'est un de ses amis qui lui parla d'un petit groupe de résistants de l'Armée Secrète qu'il décida de rejoindre. La raison de ce choix est le patriotisme très présent dans les familles de l'époque : lors des soirées, les anciens ayant connu la guerre 1914-1918 avaient fait un récit détaillé des combats qui les avaient opposés aux Allemands. Combattre l'occupant était donc pour lui quelque chose d'évident. et

 

Ses actions dans le maquis de Sèze

 

Certificat de démobilisation de la SAP

 

Henri Blanc était responsable des dépôts d'armes. Il récupérait les armes des parachutages clandestins (dès avril 1943) et les dispersaient entre plusieurs fermes des environs : le Grand Sonnailler à Alleins, La Baraque à St Estève Janson, le Grand Verger à Lambesc. et

Il s'occupait également du ravitaillement en nourriture du maquis. Certaines personnes donnaient volontiers, comme par devoir, d'autres le faisait parce qu'ils n'avaient pas le choix, les résistants prenant ce qui ne leur était pas donné. Ces réquisitions, organisées par les maquisards, étaient présentées aux Allemands comme un vol, ce qui permettait à ceux qui avaient été réquisitionnés de ne pas être inquiété par l'occupant.

D'autre part, Henri Blanc a participé à plusieurs autres actes de résistance tels que les sabotages (de nuit), souvent à risques car l'ennemi était sur ses gardes. Aidé de plusieurs résistants, il coupait des lignes téléphoniques afin d'empêcher toute communication entre les Allemands. Il a aussi à son actif le sabotage du pont de Cadenet, qu'il a rendu inutilisable le jour même du débarquement en Provence.

Henri Blanc a participé à la libération du territoire avec les F.F.I. (Forces Françaises de l'Intérieur)

 

Le 12 juin 1945, du plateau de Sèze, il assista impuissant à la prise du plateau de Saint-Anne par les Allemands.

Photographie du plateau de Sainte-Anne vu du plateau de Sèze

 

Dans le maquis de Sèze, tous les résistants eurent alors l'ordre de retourner dans leurs villages. Henri Blanc et trois de ses amis furent victimes de la rafle du 10 juillet 1944 .